jeudi 15 novembre 2007

Laïcité : A propos de l'affaire Truchelut

gaucherepublicaine.org
Faut-il dire non à la politique du soupçon ?

[...] Une liberté encadrée par la loi :

Toutes les libertés publiques sont bien entendu encadrées par la loi. Cela vaut aussi pour la liberté d'opinion. Une femme voilée exerce sa liberté d'opinion. Mais elle doit le faire dans les cadres prévus par la loi.
Ainsi, le port d'une « cagoule intégrale » (celle qui masque le visage) est d'ores et déjà interdit. Pour des raisons évidentes de sécurité publique, le visage d'une personne doit être identifiable. La burqa étant une cagoule intégrale, elle tombe sous le coup de la loi. De même, aucune parure n'est tolérée sur les photos d'identité. En vertu de ce même principe, on peut exiger d'une candidate au baccalauréat qu'elle retire son voile le temps de vérifier son identité. Il en va de même pour une religieuse.
Soulignons que l'organisation des manifestations collectives (processions religieuses, manifestations syndicales, etc.) est soumise à autorisation publique. Leur déroulement est de plus surveillé par la police. La loi oblige à des procédures semblables lors des grands rassemblements (meetings, fêtes politiques, messes dans l'espace public). Précisons enfin qu'il est possible d'arborer un signe d'appartenance politique ou religieuse dans un commerce mais qu'il est en revanche interdit de transformer ce même commerce en lieu de meeting ou de prière. Si tel est le cas, le commerçant est fondé à en référer aux forces de police : il y a alors trouble à l'ordre public.
Nous venons de rappeler les limites fixées par la loi à la liberté d'expression. Lorsqu'une femme arbore le voile islamique en restant dans ces limites, elle use de sa liberté d'opinion. Quand bien même la façon dont elle en use nous déplaît, elle n'est pas hors-la-loi. Posons-nous la question : que serait une liberté qui interdirait les opinions qui nous déplaisent ? Va-t-on suivre sur cette voie les intégristes et le MRAP, qui voulaient interdire la publication des caricatures de Mahomet ou qui exigeaient une législation sur le blasphème ?

[...] Non à une politique du soupçon. Non au maccarthisme

Que les partisans du soutien inconditionnel à Mme Truchelut ne s'y trompent pas. Comme citoyens nous sommes d'accord avec eux sur le sens qu'il convient de donner au voile. Dans l'affaire du voile à l'école, dans l'affaire des caricatures, dans l'affaire Redeker, nous avons mené une lutte sans concession contre l'intégrisme. Nous savons, du reste, que d'autres luttes sont encore à venir.
Mais il y a une limite que nous ne franchirons jamais. Au nom du refus de l'islamisme en général et du voile islamique en particulier, nous n'irons jamais jusqu'à cautionner une politique du soupçon, c'est-à-dire une politique qui juge et qui enferme sur simple présomption.
On sait où ce genre de politique mènerait immanquablement la République. Nous en avons un exemple sous nos yeux. Aujourd'hui, le simple soupçon d'accointance avec l'islamisme politique peut mener quiconque à Guantanamo. Cela se passe en ce moment même aux Etats-Unis : au nom d'une politique du soupçon, les libertés publiques sont purement et simplement suspendues. Les Etats-Unis sont d'ailleurs coutumiers du fait : dans les années 50 déjà, le simple soupçon de sympathies communistes suffisait à ouvrir la chasse aux sorcières. Cela s'appelait le maccarthisme.
Nous ne suivrons pas ceux qui, au nom de l'horreur du voile, veulent favoriser une politique du soupçon et instituer un ordre moral. Nous ne confondons pas présomption de discrimination (porter le voile) et délit de discrimination (dire explicitement que les femmes sont des êtres inférieurs ; leur réserver un « droit spécifique » tel que le code de la famille dans certains pays). Cela ne nous empêche nullement de dénoncer le voile et de combattre l'idéologie totalitaire qui l'instrumentalise. Sur ce plan, notre détermination est au moins égale à celle des inconditionnels de Mme Truchelut.

Défendre la République laïque et démocratique

[...] Notre République est à la fois laïque et démocratique. Au coeur de la République fonctionne un dualisme de principe : la sphère de l'autorité publique est soumise au principe de laïcité, principe qui exige la suspension des appartenances. C’est pourquoi nous avons lutté en faveur de la loi du 15 mars 2004 interdisant le port de signes religieux à l’école. La société civile (la rue, les commerces, les transports, etc.) n'est pas soumise au principe de laïcité : elle est régie par le principe de tolérance.
La société civile est en effet le lieu où prévalent nos libertés publiques, libertés sans lesquelles aucune démocratie n'est possible. Dans la République, la laïcité n'est pas illimitée. La tolérance non plus. Le principe de laïcité et le principe de tolérance se limitent réciproquement. La laïcité prévaut dans la sphère de l'autorité publique (sphère fermée à la tolérance), la tolérance prévaut dans la société civile (espace fermé à la laïcité). La laïcité n'est donc pas une fin en soi : elle est un moyen que la République s'est donné afin d'instituer la démocratie et de la mettre à l'abri des visées communautaristes.

Par Marie Perret, Catherine Kintzler, Jean-Marie Kintzler

commentaire : Séparer dans la République laïcité et démocratie est un faux argument .
cette conclusion de l'article est un procès d'intention, elle vise à opposer tolérance et laïcité , le concept de Laïcité, est basé sur la tolérance, elle est garante de neutralité.
Dire dans la fin de l'article que la société civile est un espace fermé à la laïcité et vouloir insinuer le danger du maccarthisme dans le cas contraire est une malhonnêteté intellectuelle. ckcnet